Le livre «Paysages du fer» retrace de manière très complète l’évolution des paysages de la Minett. (Photo: Guy Wolff/Maison Moderne)

Le livre «Paysages du fer» retrace de manière très complète l’évolution des paysages de la Minett. (Photo: Guy Wolff/Maison Moderne)

Trois experts de la Minett, Jean Goedert, Antoinette Lorang et Luciano Pagliarini, ont uni leurs savoirs pour réaliser «Paysages du fer», un livre qui témoigne des mutations de ce paysage si singulier lié à l’industrie sidérurgique, du XVIIIe siècle jusqu’aux projets de reconversion de la ville de demain.

Le volume est impressionnant. Par sa taille et son poids au premier abord, mais aussi par la quantité d’informations et de savoirs qu’il regroupe. «Paysages du fer», publié chez Gérard Klopp Éditeur, est un livre entièrement consacré au paysage de la Minett, à son remodelage spectaculaire dans la région Sud du Luxembourg et dans la partie limitrophe de la Lorraine. «En 2016, nous avions réalisé pour le Fonds Belval l’exposition «Belval – paysages recomposés» à l’occasion du Festival de la Culture industrielle et de l’innovation, explique Antoinette Lorang, alors chargée du service Culture et communication du Fonds Beval et co-autrice de l’ouvrage. Déjà à cette époque, nous regrettions de ne pouvoir étendre la réflexion au volet artistique ou de considérer l’ensemble de la région Sud avec le territoire transfrontalier. Quand Esch2022 est arrivé, cela nous a donné l’occasion de reprendre le projet et d’envisager de publier un livre sur le sujet.»

C’est ainsi que les trois auteurs, Jean Goedert, qui a été architecte indépendant et architecte-directeur de la Ville d’Esch-sur-Alzette, Antoinette Lorang, historienne de l’art – qui a donc travaillé plusieurs années pour le Fonds Belval et a aussi publié sur l’histoire de l’architecture et du logement social, l’urbanisme et la culture industrielle au Luxembourg – et Luciano Pagliarini, historien et auteur d’ouvrages sur l’histoire de la sidérurgie dans le Bassin minier luxembourgeois, ont repris leurs recherches de manière intensive, avec quelques arrêts forcés, notamment pendant la période de la pandémie de Covid.

De l’industrie lourde à la ville de demain

Pour ordonner leurs recherches et le champ d’investigation, ils décident de trois parties principales: le développement historique de ce paysage, principalement pris en charge par Luciano Pagliarini, le regard porté par les artistes sur ce territoire écrit par Antoinette Lorang et enfin les reconversions récentes et à venir sous la responsabilité de Jean Goedert.

«Au cours de nos recherches, nous avons découvert qu’il y avait beaucoup de matière et d’œuvres de qualité, souligne Antoinette Lorang. Le fait de savoir que nous pouvions compter sur un éditeur qui nous assurait une belle qualité de reproduction a beaucoup compté. Cela nous a permis d’envisager la reproduction de nombreuses images, dans des formats très variés.»

Car c’est bien là aussi une des qualités de ce livre. En plus des textes fournis et bien documentés, la publication est riche en illustrations (plans, photos, cartes) mais aussi en reproductions d’œuvres d’art qui permettent de se faire une autre image de ces paysages. «Le paysage industriel a eu tendance à fortement disparaitre», souligne Luciano Pagliarini. «Beaucoup des vestiges des anciennes usines ont été démantelés, sans réelle réflexion par rapport à la valeur de ce patrimoine. Les peintures et les photos que nous avons pu retrouver ont donc une grande valeur testimoniale.» Il faut en effet saluer le grand travail qui a été réalisé sur les représentations artistiques de ces paysages. Quatre époques distinctes sont couvertes, avec pour chacune d’entre elles une sélection d’artistes représentatifs. Une introduction permet de replacer le contexte de production de ces artistes, et les œuvres sont accompagnées par des notices descriptives détaillées ainsi que de courtes biographies des artistes.

En s’appuyant sur une approche chronologique, le livre permet aussi de souligner le changement de regard qui est porté sur ces paysages si singuliers. D’abord fierté du pays pour sa force productrice, puis terre de déclin et de difficultés sociales et économiques au moment des fermetures des usines, et aujourd’hui vestiges en reconversion et sujet à réflexion sur le patrimoine contemporain et la fabrique de la ville de demain. «Belval et Metzeschmelz sont les premières friches où une réflexion et une analyse ont été portées sur le patrimoine industriel», souligne Jean Goedert.

«La dernière partie du livre permet d’expliquer la fabrication de ces nouveaux paysages, qu’ils soient naturels avec les friches à ciel ouvert ou urbains, avec la création de nouveaux quartiers comme à Esch, Differdange et Dudelange. Ce sont des paysages de très grands projets, qui forment des mosaïques urbaines transformant les plans des villes et leurs skylines. Par ailleurs, la dynamique apportée avec Esch2022 réoriente aussi la région en un nouveau pôle d’attractivité touristique.»

«Paysages du Fer, Mutations du bassin luxembourgeois-lorrain de la minette du XVIIIe siècle au XXIe siècle», Gérard Klopp Éditeur, 59 euros.