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Pour Gary Diderich, «le moment est venu d’envoyer un signal fort»


«Les dernières décennies ont suffisamment prouvé que le marché et le libéralisme ne permettent pas de résoudre les problèmes qui se posent», souligne Gary Diderich. (photos Tania Feller)

Gary Diderich, co-porte-parole de déi Lénk, veut profiter du double rendez-vous électoral de cette année pour positionner son parti comme une véritable alternative politique. L’écologie et le social seront le fil rouge de la campagne.

Représentée par deux députées à la Chambre, déi Lénk ambitionne de s’ancrer davantage au niveau des communes. Gary Diderich dresse les contours d’un programme qui doit permettre au pays de sortir de sa torpeur. «On ne peut plus se permettre de perdre du temps avec des tergiversations», clame le co-porte-parole du parti.

Lors du récent congrès de déi Lénk, vous avez attribué une très mauvaise note au gouvernement sortant, car selon vous, la coupe est pleine. Quels sont les points qui vous font dresser cet état des lieux ?

Notre message est que les perspectives d’avenir que le gouvernement laisse à la jeune génération sont les pires jamais connues. Ce constat vaut pour l’environnement, où l’on ressent toujours plus les conséquences de la catastrophe climatique. L’écoanxiété des jeunes ne cesse de grandir. D’un point de vue plus matériel, il faut citer la crise du logement. Peu importe son origine sociale, il devient quasiment impossible de louer ou acheter un logement, sauf si l’on hérite d’un patrimoine important. On force nos jeunes à vivre dans la précarité.

La lutte contre les inégalités sociales est un des fers de lance de votre parti. Quel constat faites-vous à ce niveau ?

Il est devenu fatigant de le répéter, mais la pauvreté ne cesse de croître. Il en va de même pour le phénomène des travailleurs pauvres. La situation du logement et la problématique climatique, tout comme la guerre en Ukraine et ses conséquences multiples, touchent plus durement les gens moins bien lotis. Le tout fait que les inégalités sociales continuent à se creuser. Or le gouvernement fait comme si de rien n’était. Il ne prend pas en compte les importants besoins qui existent. Cela ne contribue pas à réduire le sentiment d’anxiété.

Trois tripartites en à peine un an ont toutefois été convoquées pour anéantir l’impact de la crise énergétique et de l’inflation galopante. Les mesures prises ne sont-elles pas suffisantes à vos yeux ?

Le problème est que les mesures ne sont pas suffisamment structurelles. On parvient à éviter le pire, sans toutefois tenir compte de la situation du climat ou des inégalités qui, elles, se répercutent sur la consommation d’énergie. Le plafonnement forfaitaire des prix a pour conséquence que les plus gros consommateurs, propriétaires de grandes villas, touchent davantage de deniers publics que ceux qui sont dans le plus grand besoin. Nous trouvons cela injuste. Déi Lénk s’engage d’ailleurs depuis longtemps pour un tarif échelonné de l’eau, du chauffage et de l’électricité.

L’OGBL, que vous soutenez ouvertement, a néanmoins défendu, mardi dernier, l’accord tripartite et le plafonnement non sélectif des prix de l’énergie.

L’OGBL est clairement dans son rôle lorsqu’il défend l’ensemble de ses membres. Il ne lui revient pas de trouver des solutions techniques. Les mesures prises par la tripartite doivent notamment freiner l’inflation. Néanmoins, les paquets successifs sont trop peu orientés vers le long terme et ne sont pas suffisamment structurels. Si l’occasion se présente, l’OGBL ne va certainement pas se fermer à des mesures plus ciblées. Le syndicat a tiré des négociations ce qui était possible. Il faut néanmoins constater que lors de ce genre de tractations, au niveau communal ou national, on sort très rapidement des arguments technocratiques et formalistes pour attribuer une fin de non-recevoir à des mesures échelonnées.

Que voulez-vous dire par là ?

Je reviens à l’exemple du prix de l’eau, où on nous répète depuis des années qu’une directive européenne rend impossible une telle mesure. Or on vient de voir le président français annoncer une tarification progressive afin de faire des économies d’eau. Un modèle semblable existe dans le Land de Brême en Allemagne. Au Luxembourg, les communes et ministères continuent néanmoins de dire que cela est impossible.

Les autres partis manquent de courage

Vos deux députées aiment souligner que déi Lénk nage à contre-courant, mais qu’à un moment, les autres partis reprennent vos propositions. Cela n’est-il pas frustrant ?

On ne compte rien lâcher. Le problème est que le temps nous échappe. Nous sommes, par exemple, ceux qui clament depuis des années l’importance de l’assainissement des bâtiments existants. Cela a un effet à la fois sur le climat et sur le social. Après l’industrie et la mobilité, les bâtiments constituent le plus important potentiel pour réduire les émissions de CO2.

Or on n’avance pas avec la politique actuelle des primes accordées par le gouvernement. Nous avons certainement l’endurance pour continuer à répéter ces messages, mais le climat va punir de plus en plus l’inaction. Le moment est clairement venu d’envoyer un signal fort. Chaque voix pour déi Lénk en est une pour souligner que l’on ne peut plus se permettre de perdre du temps avec des tergiversations. Les autres partis manquent de courage, même s’ils commencent à constater que les gens sont disposés à aller plus loin.

Pour contrer la crise du logement, vous comptez engager davantage la responsabilité des bourgmestres. En quoi consiste votre message ?

L’objectif primordial est d’atteindre dans chaque commune une part de 10 % de logements abordables à l’horizon 2030. Une telle obligation aurait dû être inscrite dans le Pacte logement 2.0, mais il n’en est rien. Un quota de 10 % n’est certainement pas suffisant, mais il s’agit d’un objectif réaliste à atteindre d’ici 2030. Il n’est d’ailleurs pas suffisant d’acheter des terrains et de construire de nouveaux logements, il faut aussi acquérir des logements existants. Le moment est plus propice que jamais, vu les problèmes de certains propriétaires à trouver un acquéreur pour leur logement. Les communes doivent prendre le relais, en profitant peut-être d’un prix de vente revu à la baisse.

Le secteur immobilier tire la sonnette d’alarme au vu d’une baisse des investissements, avec 1 500 logements qui seront construits en moins cette année. Ce cri d’alarme est-il justifié ?

La situation semble se confirmer. Or, en aucun cas, des cadeaux fiscaux ne peuvent être la réponse. Le président de la Chambre immobilière, Jean-Paul Scheuren, a clamé lors des Assises nationales du logement que la Chambre immobilière jouait en Ligue des champions et qu’il ne servait à rien de perdre du temps avec des associations créant du logement abordable. Moi, je lui réponds que s’ils estiment jouer en Ligue des champions, ils ne peuvent pas solliciter des mesures de soutien destinées à des équipes de jeunes dans un club local.

Il est plus important que le ministère du Logement mette, pendant douze mois, à la disposition des communes ou des syndicats de communes réunissant plus de 20 000 habitants, un architecte, un chef de projet et un agent administratif afin de lancer des projets immobiliers. Le même concept doit s’appliquer aux associations voulant se lancer dans le logement abordable. La crise qui s’annonce pourrait être anéantie par un investissement renforcé dans le logement abordable. Une occasion unique se présente. Il ne faudra pas manquer de la saisir. Le ministère du Logement devrait enfin passer en mode de crise.

«Les inégalités sociales continuent à se creuser. Or le gouvernement fait comme si de rien n’était», fustige Gary Diderich. / Ⓒ Photos : tania feller

Tous les éléments précités sont-ils à retrouver dans le concept d’ »écosocialisme » mis en avant par déi Lénk ?

En effet, tout cela s’inscrit dans la logique de l’écosocialisme. On a deux grandes nécessités, l’écologie et le social. Les dernières décennies ont suffisamment prouvé que le marché et le libéralisme ne permettent pas de résoudre les problèmes qui se posent. L’État ne peut pas toujours se retirer et se limiter à lancer certains incitatifs. Une planification plus appuyée de la main publique est nécessaire pour s’assurer que les objectifs fixés peuvent être atteints. On dispose bien d’objectifs climatiques, mais il n’existe aucune assurance qu’ils soient remplis. Le gouvernement se refuse toujours à une stratégie de lutte contre la pauvreté. L’écosocialisme semble être très vaste, mais il reprend les deux éléments majeurs sur lesquels on doit travailler, toujours de manière simultanée.

L’écosocialisme servira aussi de cadre à votre campagne pour les élections communales. Vous comptez mettre quels points en avant ?

Comme je l’ai déjà évoqué, la création de logements abordables constitue une grande priorité. La résolution adoptée lors du congrès est en outre axée sur la mobilité, avec le développement des transports publics en priorité. Mais il est aussi important de travailler sur l’urbanisme, encore trop centré sur la voiture. On ne tient pas compte des enfants, piétons et cyclistes. Notre intention n’est pas de combattre la voiture, mais il nous faut fixer des priorités, qui sont dans l’intérêt de tous. Une de nos revendications est aussi la mise en place par les communes d’un service public de partage de voitures. On plaide également pour la généralisation des zones 30 à l’intérieur des localités. Des mesures d’aide plus ciblées dans le domaine de l’énergie sont aussi nécessaires.

Avec quelles ambitions abordez-vous les élections communales ?

Nous allons présenter des listes à Differdange, Dudelange, Esch-sur-Alzette, Pétange, Schifflange, Sanem et Luxembourg. Une autre liste pourrait s’ajouter à Mersch. Déi Lénk sera donc présente dans la plupart des communes les plus peuplées. L’ambition est clairement de sortir renforcé et de décrocher davantage de sièges. Dans certaines communes, un changement de coalition pourrait avoir lieu avec le concours de notre parti. Si les négociations programmatiques débouchent sur un accord viable, nous serons bien évidemment prêts à prendre des responsabilités.

Au niveau national, déi Lénk continue de s’attaquer au LSAP. Or le CSV redoute déjà que la coalition tricolore sortante intègre votre parti pour garder la majorité. Une telle constellation est-elle possible ?

Notre intention primaire est d’envoyer un signal fort avec les propositions que nous allons mettre sur la table. On ne se donne pas d’objectif chiffré, même s’il est clair que l’on cherche à décrocher plus que les deux mandats de député actuels. Le plus important sera ce que l’on pourra faire bouger grâce à notre résultat. Il est hors de question de diluer ou populariser nos idées pour obtenir un meilleur résultat. En fin de compte, la programmatique sera décisive pour intégrer une majorité. Certains partis disent qu’ils veulent faire plus, mais qu’ils ne le peuvent pas. S’ils en veulent vraiment plus, nous serons prêts à les soutenir. Mais si c’est pour se contenter de l’effet d’annonce, ce sera non. Une participation gouvernementale sans des engagements sociaux et écologiques conséquents ne renforcerait que les partis de l’extrême droite.

 

2 plusieurs commentaires

  1. Oui mais le socialisme non plus. La prospérité diminue tandis que la population augmente. C’est un baril de poudre. Le capitalisme est une bonne chose, ce qui n’est pas bon, c’est l’hérédité de le l’argent. Plus il y a de gens qui ne font rien, plus il faut de l’immigration. Il faut être content pour l’argent des autres, s’ils ont travaillé pour l’argent. Les successions cependant, c’est tellement injuste.

  2. Dans l’histoire -récente – de l’humanité, la gauche a toujours été synonyme de catastrophe économique, politique et morale.
    Voyez l’ex-URSS, la Corée du nord, le Cambodge de Pol Pot, la Chine de Mao, Cuba, Vénézuela et plusieurs pays africains.

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